le jeu vidéo peut-il être un moyen d’éduquer ?

Krakaendrragon est une bande dessinée parue en 2014 dans laquelle l’éducation nationale, dans un espoir de modernisation fait du jeu vidéo l’axe principal des cours. Bien que cela reste une fiction humoristique, la bande dessinée repose une énième fois la question : le jeu vidéo peut-il être considéré comme un medium d’apprentissage ? Et de quel apprentissage est-il donc question?

La fiabilité des jeux

Le out premier critère d’un jeu qui servirait de base à un cours est sa fiabilité. Il faut se demander si l’on peut vraiment prendre le jeu comme une donnée historique ou géographique fiable. En effet, contrairement aux artefacts, les jeux sont postérieurs à la scène qu’ils montrent : ce ne sont pas des documents historiques mais des reconstitutions. Par exemple, dans Assassin’s Creed : Unity qui se passe pendant la Révolution, une grande portion de Paris a été recrée pour livrer un espace jouable que l’on peut explorer. Mais petit anachronisme: la carotte des tabac est présente dans le jeu alors qu’elle n’apparait que bien plus tard. Cet anachronisme a pour but de rappeler que l’on se déplace dans Paris, elle est là pour l’immersion bien que du point de vue purement historique, ce soit impossible. Cette adaptation temporelle importe peu mais elle indique que parfois la fiabilité historique peut-être parfois sacrifiée au nom de l’immersion. Les créateurs de jeux vidéos font souvent appel à des spécialistes pour faire de leur jeu quelque chose de crédible mais, entre crédibilité et reconstitution historique, il y a un fossé. L’un des grands avantages du jeu vidéo dans le cadre de l’apprentissage est qu’il illustre tout aussi bien des faits que des principes. On peut saluer le Discovery Tour by Assassin’s Creed qui permet d’explorer librement l’Egypte ancienne, il se démarque du jeu puisqu’il n’y a pas d’action, simplement la liberté d’explorer et de se renseigner.

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L’arrivée des casque VR parmi un large public permet de multiplier les expériences d’immersion. Peut-être qu’un jour on pourra visiter des phénomènes à l’autre bout du monde sans avoir à sa déplacer ce qui serait utile pour les cours de géographie par exemple. La numérisation grandissante, avec notamment les tableau numériques, au sein des écoles permet de nombreuses possibilités aux professeurs: tracer des lignes de front, de relier des points pour en faire des courbes, des calculs compliqués…

Les jeux d’apprentissage

IL existe des jeux pour aider les jeunes enfants à reconnaitre, les lettres, les formes, les couleurs… Parmi eux, on retrouve Lapin Malin, Adibou ou encore Powerz. Ce sont des jeux qui rassurent les parents quant à leur contenu. Dans le meilleur des cas, l’enfant apprend des choses, dans le pire des cas, le jeu est juste niais. Mais il demeure une question : pourquoi acheter un jeu alors que l’enfant peut apprendre à compter avec ses parents ? En gros, qu’apporte le support numérique?

Pour répondre à cette nécessité, il faut considérer le jeu comme un cahier de vacances interactif, c’est un mélange entre le ludique et le sérieux. Dans les cahiers papier, les deux sont volontairement séparés: on est en classe pour apprendre, pas pour jouer. Et pourtant, cette sacro-sainte opposition n’est pas aussi rigide que l’on pourrait le croire. Aussi, apprendre un langage informatique (par exemple) sera bien plus intéressant si on en voit l’utilité en développant son propre logiciel. Ce que les supports numériques parviennent à faire contrairement aux anciennes méthodes, c’est donner un but, rendre palpable ce dont il est question. Le support numérique, par ses capacités, est capable de donner une envie de progresser dans le jeu.

Depuis quelques années, les élèves français apprennent le python, ce qui est une excellente chose mais son utilisation est mal pensée: les élèves font des choses que l’on peut déjà faire à la main, l’apprentissage ne sert pas à grand-chose et le python n’est vu que comme une anecdote secondaire alors qu’il permet de développer une logique et des bases qui serviront pour plusieurs autres langages.

Il serait facile de dire que les jeux éducatifs ne touchent que les enfants. Certains s’adressent à un public plus âgé comme Soldats Inconnus et renseignent non seulement sur l’histoire avec un grand ‘H’ mais aussi sur le quotidien des tranchées, le no man’s land ou les camps de prisonniers. Ce qu’il faut retenir, c’est que toutes les catégories de joueurs et de joueuse ont des jeux éducatifs qui leur correspondent.

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Le Bildungsroman

Si on pousse le concept de jeu/éduction à son paroxysme, on peut dire que tous les jeux ( ou du moins une écrasante majorité) enseignent quelque chose, ou font réfléchir sur certains points comme la relation père fils, l’amour, l’amitié, la mort etc…Un bon jeu n’est pas celui qui nous offre la meilleure morale à la fin du jeu mais celui qui a le plus ébranlé nos certitudes. Un peu à la manière d’un cyber-Socrate, le jeu propose une remise en question de qui nous paraissait évident. Il n’y a pas de réponse unique et c’est à chacun de déchiffrer le ce qui a été compris du jeu. D’une certaine manière, on ressort grandit à la fin d’un jeu comme on peut l’être à la fin d’un film ou d’un livre. Le jeu vidéo peut être qualifié de Bildungsroman, c’est-à-dire un « roman d’apprentissage » : un personnage naïf mais ambitieux part dans une aventure qui l’aident à grandir et à devenir un adulte accompli.

Dans cette vision, La saga Metro est un exemple intéressant : Artyom quitte la station dans laquelle il vit pour rejoindre la capitale. Il y croisent toutes sortes de personnages (des néo nazis, des communistes, un vieil homme très humain….). Au terme de l’aventure qui a mené Artyom au quatre coins du métro moscovite, aucune doctrine ne semble la meilleure, c’est au joueur de choisir que faire. Dans le livre , Artyom s’interroge aussi « Qui croire ? En quoi croire? Dans le grand Ver, le Dieu des cannibales , façonné d’un train électrique […] Quelque chose soufflait à Artyom qu’il n’y avait aucune différence profonde entre tout cela. Toute foi est une canne pour l’homme, elle le soutenait, l’empêchait de faire un faux pas, ou l’aider à se remettre debout si s’il venait à choir malgré tout […] Visiblement, ce macaque intelligent s’agrippait à son bâton, ce qui l’avait empêché de se redresser pleinement se disait le jeune homme. »1

Pour conclure, les jeux peuvent être utilisés de manière éducative. Le problème ne vient pas des jeux en eux-mêmes mais de l’utilisation que l’on en fait. Après une tuerie dans une école américaine, il a été révélé que le tueur jouait beaucoup à Call of Duty. On peut se demander jusqu’à quel point les jeux vidéos impactent nos vies, que ce soit en bien ou mal. Tout dépend de l’utilisation que l’on en fait. Enfin, il peut exister une fracture technologique entre le corps professoral et les élèves, habitués à ce médium: il ne faut pas garder seulement le côté ludique, l’équilibre est fin.


1: in Metro 2033 de Dmitry Glukhovsky page 778

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