Bouh ! je suis Cthulhu et je fais très peur !

*Sur un banc imaginaire, M-A vient me rejoindre. Comme elle voit que je lis La Maison Maudite, la discussion s’engage sur Lovecraft et son œuvre dans le monde du jeu vidéo*

Deux illustrations du Dieu ancien parmi mes préférées:
-François Barranger à gauche ( son artstation)
– Sofyan Syarief à droite ( son artstation)

La Lettre: les dév’ ont aussi lu Lovecraft


« Hey ! Une idée traverse M-A: t’aurais pas envie de faire un article sur Cthulhu ? Ou au moins sur le mythe qui l’entoure ? Y a un tas de jeux qui s’en inspirent.
-Je sais, c’est même sûrement un des auteurs les plus présents dans le monde vidéoludique avec Tom Clancy. Mais justement, cette surabondance de Cthulhu, de bestioles ailées ou de monstres à tentacules me gonfle plus qu’autre chose. Dans les nouvelles1, Les Dieux monstrueux (à deux trois exceptions près) sont absolument indescriptibles, ils dépassent l’entendement: comment tu veux montrer ça ? Honnêtement, est-ce que Cthulhu fait encore peur ?
– C’est vrai qu’il est tellement utilisé partout qu’il devient plus une mascotte, un easter-egg qu’une abomination. Mais après c’est plutôt amusant de retrouver des références comme les Dieux dans World of Warcraft ou la fin de Discworld Noir avec le Necronomicon.
– Ben justement, à mon gout, ce sont des facilités, des clins d’œil vides de sens, juste là pour faire plaisir aux joueurs et faire « cool ». En soit, on pourrait retirer les références au mythe sans que le jeu en soit modifié, tout est gratuit. Chez Lovecraft, tout a un sens, il faut se méfier du réel, chercher ce qui se cache derrière l’illusion… Tout le contraire des blagounettes qui sautent au visage et brisent le quatrième mur. Une adaptation peut être bonne, très bonne même mais elle peine à retrouver la force des écrits. Il faut se rendre à l’évidence : l’image tue l’imaginaire. Et ce n’est pas en mettant de l’obscurité que ça change quelque chose. Alors oui, Certains jeux peuvent faire peur. Mais ils ne font « que » peur, il n’y a pas de transcendance démente. »

Image
Le jeu est plus une adaptation du jeu de rôle qu’une copie carbone du livre

Hésitation de M-A :
 » Je ne comprends pas, une référence, c’est toujours sympa non ?
-Prend par exemple Terraria, il y a deux boss qui font référence à Cthulhu: l’Œil de Cthulhu et le Cerveau de Cthulhu. Mais aucun des deux n’a vraiment de lien avec de dernier, c’est juste pour montrer que les développeurs connaissent le monstre2. En soi, seul le nom fait office de signe, rien ne rappelle la créature.
-Mais…

L’esprit: « Alors armez-vous de courage et souvenez-vous qu’il ne peut y avoir de bravoure sans folie »3

Images extraites des cinématiques de The Darkest Dungeon et un fanart de la La Présence lunaire de Bloodborne

M-A enchaine sur le fait qu’il n’y a pas que des références creuses ou des apparitions sans réelle importance dans le jeu.
« Mais prends Bloodborne, par exemple, on y retrouve tous les éléments lovecraftiens: transcendance, folie, savoirs interdits, mélange des temporalités, créatures qui dépassent l’entendement humain.
– Et c’est pour cette raison que j’adore Bloodborne, il intègre l’esprit de Lovecraft sans s’abaisser à en faire une copie carbone. On y retrouve bien des « Dieux » mais ils sont en permanence en mouvement, et non pas figés en easter-eggs. Ils servent intrinsèquement le scénario et le jeu ne pourrait fonctionner si on retirait les éléments lovecraftiens.
– Je vois. Dans ce cas, il n’y a pas que Bloodborne, On peut trouver d’autre jeux qui jouent sur des éléments de Lovecraft en les intégrant pleinement à leur gameplay. Je pense à The Darkest Dungeon qui utilise le démence, la mort violente et des « forces antédiluviennes« . En plus, certains personnages sont empruntés à Lovecraft, par exemple, le collectionneur fait penser au Roi en jaune. Pareil pour le Shambler qui pourrait être une illustration d’un récit d’Arkham!

M-A s’enflamme: « Dans ce jeu, il faut avancer le plus loin possible tout en évitant de rendre les personnages fous. C’est le leitmotiv des nouvelles de Lovecraft: jusqu’où sommes-nous prêts à avancer quitte à voir ce qu’aucun ne devrait voir. Même le DLC The Color of Madness reprend la nouvelle « La Couleur venue d’ailleurs » avec la ferme, la couleur changeante et les personnages qui se réduisent en poussière… Et tout ça au service de la folie puisque de nombreuses attaques des ennemis visent la santé mentale. Ca ! c’est pas un clin d’œil vide comme tu les aimes tant !
– D’ailleurs dans la suite du jeu, le trailer révèle que l’aventure se passera dans des montagnes enneigées, j’espère que le scénario s’inspirera des « Montagnes de la folie », un classique des classiques et qui a son lot de ruines à explorer, de secrets enfouis et de monstres répugnants. Il faut seulement espérer que le studio trouvera le juste équilibre entre copie carbone et simple référence. »

Un remerciement spécial à François Barranger qui m’a autorisé à utiliser une de ses peintures et Marie-Alix (aka Mavis25) qui a bien voulu me donner la réplique.
Par ailleurs, si ce format d’article « conversation » vous plait, n’hésitez à le signaler ( et s’il ne vous plait pas, signalez-le aussi)


1: ici, il n’est question que des écrits de Lovecraft et pas le reste. A mon gout, les écrits d’August Derleth sont au mieux de bons plagiats, au pire des apocryphes sans sens…
2: alors que de mon point de vue, le « Wall of Flesh » est bien plus proche de l’univers lovecraftien.
3: Citation de la vidéo d’introduction de The Darkest Dungeon

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