Voici quelques semaines de cela, alors que je regardais des vidéos de chats sur Instagram (les chats oranges sont les meilleurs, par ailleurs), je tombe sur une vidéo appelée « Reverse Heist : Tate Modern ». Celle-ci m’a assez agacé et j’ai quitté l’application. Pourtant, pendant plusieurs jours, la vidéo m’a travaillé et j’ai voulu y revenir pour en faire une critique construite. Après quelques temps de cogitation et une double page de notes, c’est parti pour une critique en bonne et due forme ! Voici la vidéo en question :
Que ce soit bien clair : je n’ai rien contre Criatura. Je n’aime pas ce qu’il fait mais je sais qu’il en faut pour tous les goûts; en revanche, il représente quelque chose que j’ai beaucoup de mal à supporter : un regard sarcastique et méprisant sur l’art moderne, jugé comme trop snob et décadent. Regard appuyé par une certaine inculture qui empêche de clairement justifier ce qu’on reproche et encourage à faire des généralités suffisamment vagues pour qu’elles paraissent universelles et intelligentes. Aussi, chaque point de cet article sera argumenté, justifié et une bibliographie précise sera donnée pour vérifier les informations. On peut ne pas aimer quelque chose, mais pouvoir argumenter précisément son point de vue me semble être la base de la critique un tant soit peu intellectuelle : une critique qui mérite de faire débat, à laquelle on peut répondre. En deux mots : une critique critiquable.
(Je vous promets que je n’ai rien contre Criatura en tant que personne, hein!)

Hegel et la photographie, le fond et la forme
Criatura explique qu’un faire un travail sans fond ne peut être jugé comme acceptable par notre société. En effet, c’est un point que l’on peut lui accorder : aujourd’hui, le gratuit est souvent vu comme puéril et l’absence d’engagement comme un aveu de lâcheté. Pour remonter à cette origine, il faut se pencher sur Hegel. Ce philosophe allemand appartient à la veine romantique et est le premier à théoriser, dans son livre Esthètique (1818-1829) l’idée du fond et de la forme : le quoi et le comment. Pourtant, il ne faut pas oublier le contexte de ce concept : les idées des Lumières traversent l’Europe, confortées par la Révolution, puis violemment contredites par les guerres de « libération » de Napoléon. A cette période, on commence à envisager l’art non pas seulement par sa valeur morale mais comme support d’idées, comme véhicule politique dans le sens large. Il faut toucher le maximum de gens, les rallier aux différentes aspirations. Conservatisme religieux comme idéal républicain s’affrontent, que ce soit dans les caricatures des journaux, les estampes collées à la va vite ou encore, bien sûr, dans les salons et les galeries. Pour donner un exemple, le peintre romantique Caspar David Friedrich peint en 1814 Der Chasseur in Wald : on y voit un soldat français à l’orée d’un bois sombre, le sol est tapi de neige. Bien qu’on puisse apprécier l’œuvre pour sa forme, c’est son engagement politique qui la rend intéressante. Depuis un an, l’Allemagne fait face aux violentes exactions des troupes napoléoniennes et la toile est autant un cri patriotique qu’un avertissement sanglant à l’envahisseur : le soldat va se faire massacrer dès qu’il sera dans le bois, symbole de la Widerstand et de l’Allemagne en général, comme l’annonce la couleur sanguinolente qui recouvre le sol du sous-bois. Cette mort est aussi annoncée par le corbeau et les troncs du premier plan. De plus, la scène de soldats massacrés dans une forêt rappellent sans équivoque la bataille de Teutobourg ( an 6 après JC) qui vit la fin des conquêtes romaines à l’Est du Rhin suite à une violente embuscade qui mit en pièce la force d’invasion. Cette peinture n’est qu’un exemple de l’engagement politique que connaissent les arts au début du XIX° siècle. L’art descend de son piédestal spirituel pour s’intéresser au bas monde; conception dont Charles Baudelaire se fera le chantre avec, notamment, Une Charogne (1861) et Perte d’auréole (1869).

Il faut aussi noter qu’au cours du XIX° et du XX° siècle, l’art connaît de profondes révolutions techniques qui changent profondément le rapport que les artistes entretiennent avec leur médium. L’art est bouleversé par l’arrivée de la photographie qui permet de montrer le réel avec une précision inégalable. Dès ses débuts, la photographie cherche sa justification en imitant la peinture (d’ailleurs de nombreux photographes étaient des portraitistes). La réaction de la peinture est de chercher à représenter le réel d’une manière nouvelle, en montrant le fond des choses et non pas sa simple apparence comme le fait la photographie. Monet se penche sur l’étude de la lumière et délaisse presque le motif, Kandinsky et Mondrian s’orientent vers la recherche d’harmonie entre les formes et la couleurs et ainsi de suite. De même, le choc de la Première Guerre mondiale puis des camps de la mort font dire à un grand nombre d’artistes qu’il est impossible de montrer le réel, celui-ci étant insupportable. En plus de ces bouleversements, l’émergence du pop art redistribue les cartes en cherchant de nouveaux supports de l’art, même parmi les choses que l’on pourrait qualifier d’inesthétique. La mondialisation, notamment en lien avec les nouvelles technologies, change définitivement le rapport du public à l’art et en particulier de celui des minorités dont les revendications se font de plus en plus entendre. Enfin, l’explosion de l’importance du moi dans la société et l’art rend inévitable l’imprégnation de l’art par la subjectivité qui observe le monde et construit la représentation. Tous ces changements, qu’ils éclatent au grand jour d’un seul coup ou qu’il s’agisse de métamorphoses plus subtiles contribuent à orienter l’art non plus vers une perfection de la représentation mais de plus en plus vers un contenu politique et subjectif. Le dernier sursaut réactionnaire est l’hyperréalisme pictural, mouvement principalement américain, qui peine à exister plus d’une dizaine d’années et vivote depuis.
En guise de conclusion à cette partie, il faut donc souligner que ce n’est pas tant que l’art moderne ne supporte pas ce qui n’a pas de sens, c’est plutôt que les évolutions de la société ont poussé l’art à se politiser plus qu’il ne l’était et à quitter l’idéal de représentation fidèle du monde au profit d’une exploration de nouveaux espaces et de nouvelles subjectivités. Bien sûr, tout ceci n’est qu’un extrême résumé de près de deux siècles d’évolution lente et complexe, faite d’avancées, de retours en arrière, de tâtonnements et d’hésitations. Ce que j’ai voulu montrer, ce n’est pas tant que l’art moderne ne tolère pas l’absence de sens mais plutôt qu’il a tant explosé en une multitude de fragments divers que se focaliser sur la recherche esthétique du beau et de l’agréable n’est plus suffisant, quoi que cela puisse, en soi, constituer un sens, comme nous le verrons tout à l’heure. Les XIX° et XX° siècle ont définitivement enterré la trinité que Platon dresse en dogme de sa philosophie : le Beau, le Vrai et le Bon, tous trois se fondant dans l’eidos.
L’échec de la vidéo : un ratage de forme et de fond
Retournons à la vidéo. Pourquoi est-elle un ratage de A à Z ? En fait, la peinture, et l’ensemble de la vidéo relèvent bien de l’art moderne et ce, à plusieurs niveaux. Tout d’abord, l’écriture qui domine la peinture donne une signification et une intention : elle fait sens. Lutter contre le sens, est en soi, faire sens. De plus, l’écriture en elle même confirme la chose, ce n’est pas une simple supposition que peut se faire le spectateur. Montrer quelque chose et clamer au dessus que cela n’a pas de sens se rapproche beaucoup de Magritte, voire le copie. En imitant Magritte, Criatura se place aussi dans un lignage historico-esthétique, ce qui, à son tour, contribue à donner du sens à la toile. S’inscrire dans une tradition picturale, c’est guider les attentes du spectateur pour mieux l’épater ou le surprendre, or la peinture s’inscrit dans un héritage à la fois absurde (l’écriture) et pop (couleurs et représentation). On est donc loin du non sens affiché par le peintre. Pour continuer dans la forme avant de passer au fond, Criatura a cru bon de rajouter une plaque en dessous de sa toile en guise d’explication. Et c’est aussi une erreur… Expliquer sa volonté au moyen d’un petit panneau cherche à justifier la présence de la peinture au sein de la galerie. Du point de vue la forme (un tableau et un panneau), on est encore une fois dans l’académisme de n’importe quel musée et c’est une source de sens. Pour un tableau qui se veut provocateur et anti-art moderne, on ne s’éloigne que peu des attentes que l’on peut avoir dans un musée, surtout dans un musée d’art moderne.

Maintenant que la peinture a été analysée, intéressons-nous à la vidéo. En effet, c’est bien à travers une vidéo que la peinture a été connue ! Celle-ci donne à voir un processus de création, avec une intention précise suivie d’une mise en œuvre. La vidéo est tournée grâce à un acolyte, comme le montrent les passages où le peintre est vu de plein pied. Le fait de se faire filmer permet de mettre en évidence que le peintre fait aussi une performance. Il met tout en scène, de son discours, assis sur sa chaise, à la mise en place de son tableau, sans oublier de prendre en compte les plans où on le voit, en train de poser devant la caméra. De plus, publier la vidéo sur les réseaux sociaux (Instagram puis TikTok) revient à se faire de la publicité de la même manière que n’importe quel artiste le ferait s’il venait à être exposé en galerie. D’ailleurs, c’est une franche réussite : simplement sur la vidéo TikTok de sa chaine, on ne compte pas moins de 19 700 commentaires, 3 millions de likes, 232 000 sauvegardes et la bagatelle de 24 000 partages. Son site internet, mais aussi sa photo de profile arborent des tentacules, sa marque de fabrique. Autrement dit, son travail est immédiatement identifiable et il joue de cette facile reconnaissance. J’ai mis en avant une certaine vidéo, mais son compte TikTok en contient trois sur le même thème : un autre affichage lors de l’exposition Art Basel à Miami avec un objectif similaire et une autre vidéo où on le voit peindre le tableau de la Tate Modern. Ces trois vidéos sont regroupées dans la même playlist mais il faut compter au moins 9 autres vidéos de sa chaine où l’on peut voir les peintures exposées et/ou Criatura parle de ses accrochages sauvages. Dans ses autres publications, il continue de se mettre en scène pour répondre à des commentaires ou encore faire des blagues sur l’incapacité de la sécurité des deux galeries à empêcher son si brillant coup de génie. Bref, tout est mis en scène avec efficacité, et cela marche. En apparence, du moins : toute sa petite mise en scène de sa « performance » rencontre un certain succès et on ne peut pas dire qu’elle soit sans but ni sans sens…
Mais plus que tout, c’est peut-être le lieu d’affichage qui fait le plus grand paradoxe. La Tate Gallery est mondialement connue pour sa richesse, avec pour axe principal l’art moderne et contemporain. Elle accueille une multitude d’artistes de tous les continents, y compris des artistes provocateurs voire virulents refusés dans des pays plus rigoristes. La Tate recherche l’innovation, quelle que soit sa forme, à l’image d’une œuvre dont un bout est vaguement vu pendant une demi-seconde et qui est qualifiée de « This urinal » par notre Banksy à tentacules. Il s’agit de l’œuvre « Fountain » (1917) de Marcel Duchamp : un urinoir renversé de manière à en faire une fontaine. Une œuvre si irrévérencieuse qu’elle a causé des débats sans fin qui se poursuivent aujourd’hui, si hors norme que la critique n’a jamais su dire s’il s’agissait d’un coup de génie ou d’une grosse provocation amusante, si marquante qu’elle est souvent utilisée comme moment clé de l’art moderne au point d’inspirer de nombreux artistes tels un certain Warhol, au point d’être parfois considérée comme l’œuvre la plus marquante du XX° siècle, juste avant Les Demoiselles d’Avignon (Picasso, 1907) et le Marylin Diptych (Warhol, 1962). Pour en rajouter une couche sur la culture de l’avant-gardisme de la Tate Gallery, il faut aussi rappeler que Duchamp n’a autorisé que 17 répliques de sa fontaine dont l’original a été perdu : seules 12 sont visibles dans des musées, les autres ayant disparu ou ayant été acquises par des particuliers. Que la Tate Gallery ait fait l’acquisition d’un exemplaire est une démonstration de son caractère téméraire1 . D’une certaine manière, que quelqu’un y expose un tableau affirmant qu’il n’a pas de sens ne paraît pas spécialement déplacé en un tel lieu. A vrai dire, j’ai été un peu sceptique lors du premier visionnage de la vidéo, me demandant si ce n’était pas une blague organisée par la galerie elle-même pour faire de la pub. Quoi qu’il en soit, en fonction de quelques détails donnés et vus dans la vidéo, je pense que le tableau accroché à la sauvette (s’il y est encore!) devrait se situer au 4° étage, dans le bâtiment Natalie Bell, dans la salle 4, près de la 3. Si vous y allez, prenez votre plus beau selfie et envoyez-moi en photo la plaque, j’ai vraiment envie de savoir que notre Duchamp en herbe y a écrit.

Sus au sens !
Jusque là, j’ai parlé de l’art moderne en me gardant bien de le définir. Et pour cause ! A l’inverse de nombreux autres genres apparus jusqu’à présent, l’art moderne n’a rien d’un mouvement artistique uni ni même guidé par un fil directeur unique. Pas plus qu’il n’existe de chef de fil, il n’existe de définition précise car toute approche trop précise exclurait des travaux et toute définition trop large serait insatisfaisante. En première partie, je me suis intéressé aux conditions de naissance -en ne faisant que les survoler pour d’évidentes raisons de taille de l’article- du mouvement, ou plutôt, des mouvements que l’on regroupe sous le nom d’art moderne. L’élément qui serait, à mon goût, le plus représentatif de l’art moderne n’est pas forcément la pluralité de ses formes et fonds, mais plutôt les publics qu’il rassemble. En effet, la grande spécificité de l’art moderne c’est d’avoir su toucher un public si large qu’il a su s’imposer partout. Il a quitté les murs académiques des musées pour s’exporter dans la rue, les friches, la nature et autres lieux plus ou moins informels. Qu’on le veuille ou non, on est entouré par l’art moderne que l’on retrouve partout, y compris dans la publicité qui en reprend les codes pour faire « jeune et branché ». L’art moderne a su brillamment renouveler le public en abolissant l’idée d’une séparation entre l’art noble et l’art populaire mais aussi en renouvelant les attentes de ce public. Il faut dire qu’à la fin du XIX° siècle, l’art devient de plus en plus provocateur, il s’attaque au sacré, au beau et à l’Idéal. Le décadentisme fin-de-siècle, connaît un succès retentissant, qu’il s’agisse de la littérature (Huysmans, Villiers de l’Isle Adam, Laforgue…) des arts visuels ( Rops, Redon, Schwabe, Schiele…) mais aussi dans la musique (Schönberg, Adorno, Bernhardt …) et dans la philosophie et les modes de vie ( Nietzsche, le dandysme etc…). C’est le livre Essai de psychologie contemporaine (Paul Bourget, 1883) qui fournit une première définition de la décadence du Second Empire dans lequel se reconnaissent les artistes. Un des buts préférés des artistes est de choquer la bonne société bourgeoise, très morale et dévote. Ce but est fortement conservé par l’ensemble de l’art moderne et semble souvent illustrer une fameuse phrase du poète et activiste des droits humains Cesar A. Cruz : « Art should comfort the disturbed and distrub the comfortable« . Le public demande à être choqué, dérangé et les artistes modernes l’ont bien compris.

Cette recherche de la provocation et de l’outrance a tendance à pousser les travaux modernes vers un contenu plus axé sur le fond que sur la forme qui est parfois volontairement délaissée pour choquer ceux qui s’attendent à voir un travail formellement parfait et abouti. L’art naïf se base sur ce présupposé en ne travaillant que peu la forme afin de laisser le spectateur comprendre que l’intérêt de l’œuvre ne réside pas dans une prouesse technique : le but est ailleurs. En effet, il ne faut pas penser le réflexion d’Hegel comme un mélange de 50% de forme et de 50% de fond, dans un stricte mélange. Il s’agit plutôt d’une fine adéquation dont l’alchimie est laissée à la sensibilité de chaque artiste. Pourtant, il ne faut pas perdre de vue qu’une œuvre d’art est avant tout un résultat visuel, auditif ou sensoriel et non pas un livre de philosophie. Il me semble souvent déplacé d’attendre d’un travail qu’il soit d’une profondeur incroyable et qu’il remette en cause tout ce que l’on sait. Pour appuyer mon propos, j’ajouterai que la volonté de choquer est devenue si commune qu’il n’y a rien de plus commun que de vouloir faire dans l’irrévérence. C’est aussi pour cette raison que Criatura se fourvoie : en voulant se moquer de l’art moderne et de son public, il fait de l’art moderne et conforte les spectateurs dans leurs attentes. Dans la forme, l’art le plus populaire, actuellement, est le pop art et dans la forme, il est de bon goût d’être provocateur. Or, que fait ce peintre dangereusement punk ? Exactement ce qu’il critique.

Outre la démonstration de faire preuve d’une certaine inculture en ce qui concerne l’art moderne en mettant toutes les productions dans le même panier, Criatura a néanmoins le mérite de soulever un point intéressant : la difficulté de définir pertinemment l’art moderne, notamment en rapport au sens qu’il est supposé avoir. L’outrage comme critère de sens et de qualité paraît de plus en difficile à défendre tant tout semble avoir été fait depuis l’actionnisme viennois. Alors de plus en plus d’artistes retournent vers la performance technique, le savoir-faire et le perfectionnement pour penser leurs travaux. Se démarquer, ce ne serait plus forcément être le plus provocateur (voire vulgaire!) possible mais avoir une technique excellente. Les nouveaux médiums digitaux permettent de renouveler profondément la forme, qu’il s’agisse de la précision du travail, de ses couleurs, de sa fluidité s’il est en mouvement ou encore de son approche expérimentale. La recherche technique pousse également à s’intéresser avec un regard d’esthète aux choses du quotidien, ces choses qu’on aime pour leur qualité fonctionnelle, mais qui une fois utilisées en tant que système esthétique sont rendues intéressantes pour des qualités inattendues. Ces recherches ont produit de franches réussites (Marcel Duchamp, Andy Warhol, Richard Serra, Alexander Calder…) et d’autres, qui sont, selon moi des ratages retentissants (Ben et sa graphie, les fleurs naïves de Murakami…). Il ne s’agit pas de dire que les travaux de ces artistes n’ont aucun sens2 ! Ce qui prime chez eux, est avant tout la forme, dans une recherche d’un nouveau beau, d’un équilibre agréable et d’une osmose délicate entre la forme brute et son environnement. Encore une fois, ce brave Criatura, avec des tentacules, rejoint l’art moderne… Plus précisément, la toile de Criatura incarne un aspect que je n’aime pas dans une certaine frange de l’art moderne : une fausse naïveté qui cache bien souvent un manque de talent sous prétexte de déconstruction et une portée dont on n’est pas bien sûr, faute de connaissances précises dans l’histoire de l’art moderne (chacun interprète comme il veut la vacuité de ce qui est montré) : il ne faut pas confondre le profond et le creux !

Pourquoi avoir fait un article sur une vidéo que je n’aime pas, un tableau médiocre et une « performance » au ras des pâquerettes ? Hé bien parce que même si l’ensemble est sans le moindre intérêt à mon goût (qui devrait être universel, soit dit en passant!) il n’en reste pas moins un bel exemple de la difficulté à définir l’art moderne, que ce soit dans son fond, sa forme, son utilité etc. Il s’agit du premier « mouvement » artistique mondial qui, dans sa gigantesque diversité ne saurait être ramené à une définition unique. Et je me permets de revenir marteler le fait que faire quelque chose sans qu’un sens profond ne s’en dégage n’est pas à mépriser, pas plus qu’il faut faire des généralités à partir de ce qu’on croit savoir comme le fait si brillamment cet article de FactZ dont la portée réflective est si impressionnante que le rédacteur n’a pas su faire un contenu qui dépasse les 30 secondes de lecture, avec tant de clichés sur l’art que j’ai cru à une blague. Le seul et unique commentaire en dessous de l’article m’a plongé dans une méditation artistique si profonde que je pense jeter tous mes livres de philosophie herméneutique et esthétique! Alors, bien sûr, je ne prétends pas révolutionner ni même faire avancer l’histoire de l’art, mais il me semblait important de faire un article sur cette vidéo : même si je ne traite pas de jeu-vidéo directement, cela aide à affiner ce que je recherche dans l’art -et ce que je ne recherche pas- et à renforcer la ligne éditoriale de ce site.
1: Toutefois, pas la peine de voyager à l’étranger pour la voir : la France en possède non pas un mais deux exemplaires (Musée Maillol et Musée d’Art moderne) ! Et toc! Dans tes dents, perfide Albion !
2: Quoique pour Ben…
Bibliographie certainement pas exhaustive :
– Ce qu’est l’art, Arthur Danto, 2013, Points Essais
– La place du spectateur: Esthétique et origines de la peinture moderne, Michael Fried, 2017, Folio Esais
– Photographie et société, Gisèle Freund, 1974, Point Histoire
– l’ABCdaire du Symbolisme et de l’art Nouveau, collectif sous la direction de Gilles Genty, 1997, Flammarion
– Esthètique ou philosophie de l’art, Hegel, 1818-1829, Champs Classiques
– L’Herméneutique, Jean Grondin, 1993, PUF
– L’art moderne et contemporain, collectif sous la direction de Serges Lemoine, 2013, Larousse
– Essai de psychologie contemporaine, Paul Bourget, 1883, Tel Gallimard
