Dans Hollow Knight, le joueur contrôle une mystérieuse créature : le Chevalier. Ce petit personnage est amené à explorer Hallownest, un royaume autrefois resplendissant et civilisé mais ce bijou souterrain est désormais en proie à une étrange infection. Le Chevalier, perdu dans cet environnement tentaculaire va découvrir sa destinée tragique mais nécessaire.
Un insecte perdu dans un labyrinthe
Ne vous faîtes pas avoir : sous ses graphismes simples -voire enfantins- Hollow Knight est un jeu difficile à maitriser, qui nécessite de bons réflexes et dans lequel il ne faut pas avoir peur de recommencer un passage ou un boss autant de fois qu’il le faut. En bon metroidvania1, les aller-retours sont légion mais chaque nouveau passage nécessaire dans un endroit permet de constater l’avancée de l’infection qui s’étend toujours plus. Le monde que l’on peut explorer est vaste et recèle de détails qui rendent Hallownest convaincant.
A Hallownest, tous les habitants sont des insectes, des araignées ou des vers; le Chevalier lui-même est inspiré du pince-oreille. Néanmoins, bien qu’il ressemble un peu à un insecte, il n’en est pas un, sa tête n’est en fait qu’un masque qui cache les ténèbres qui sommeillent en lui. De petite taille et d’apparence plutôt chétive, ce petit être va affronter des ennemis bien plus grands que lui pour progresser dans les ruines du royaume souterrain. Le jeu utilise beaucoup le rapport d’échelle pour tenir un propos sur la force et le passage du temps: les grands adversaires rendent compte de force et de leur resistance; les gigantesques paysages transmettent la gloire passée d’Hallownest, en bref, le personnage est un insecte minuscule perdu dans un monde dont chaque élément semble le dépasser. Mais notre petit personnage cache un lourd secret.
Etre supérieur, votre destinée est toute tracée
Le Chevalier, visiblement amnésique, va être à redécouvrir son passé dans les plus profondes couches d’Hallownest. Résultat de la procréation de la Reine et du Roi du royaume (deux êtres divins aux immenses pouvoirs), le Chevalier fait partie d’une grande portée qui doit contenir l’Elu: un être pur capable de contenir en lui l’infection et de le maintenir dans un sommeil forcé. Dans la fratrie, une telle créature est choisie, c’est le Vaisseau Pur; le reste des créations ratées sont enfermées dans les tréfonds d’Hallownest, d’où le petit Chevalier parvient à s’enfuir in extremis. Son frère1 échoue cependant dans sa tache et devient corrompu par l’infection et le sceau qui protège Hallownest est sur le point de se briser : tout repose sur le Chevalier pour vaincre son frère et prendre sa place. Mélange de Dieux et de ténèbres (visibles notamment quand il meurt), le Chevalier est un personnage dont la seule raison d’exister est d’être sacrifié pour garantir la survie d’Hallownest. Pour renforcer cette réalité, le Chevalier ne parle jamais, comme si personne n’écoutait ce qu’il a à dire.
Un Sacrifice poignant
Hollow Knight porte une réflexion intéressante sur le passage du temps et la mémoire. Durant tout le jeu, on peut entendre des personnages faire référence au passé glorieux d’Hallownest. Le Chevalier se sacrifie pour que les restes de cette mémoire ne tombent pas dans l’oubli; mais qui se souviendra de lui ? certainement pas les personnages qu’on rencontrent, marchands et autres, tous obsédés par une tache particulière (cartographier le royaume, vendre/arnaquer les passants, fantasmer un héros qui n’est pas le bon, raviver la mémoire d’une amante…). Le Chevalier occupe une place centrale dans Hallownest mais personne ne s’en rend compte tant chacun vit dans le passé et n’en sort que pour confier une tache au Chevalier, une tache liée au passé. Seule Hornet, dont le devoir de protection d’Hallownest a pris fin, se souvient du combat sanglant qui a opposé ses deux demi-frères pour la survie du royaume. De même, dans l’au-delà, peut-être que l’ombre du Vaisseau Pur se rappelle de ce combat dans lequel il aide au dernier moment son frère à vaincre la source de l’infection. Enfin, le fantôme de Quirell, déjà amnésique de son vivant, se souvient avec un peu d’espoir du petit être avec qui il partagé de longs moments, aux côtés duquel il a vécu ses derniers instants. En bref, ceux qui se souviennent du Chevalier sont des morts et des exilés: les rares qui ont partagé jusqu’au bout le fardeau du Chevalier car ils étaient eux aussi destinés à se sacrifier. Malgré les couleurs chatoyantes et les graphismes simples, le jeu est en fait très pessimiste, il s’agit de mourir pour un monde qu’on ne connait qu’à peine et qui ignore l’existence de son sauveur. cela se trouve dans son personnage principal, une petite créature muette et sans expression, qui va faire face à son destin sans protester.
En jouant à Hollow Knight, un fait m’a particulièrement frappé: ce jeu ressemble énormément à Dark Souls et pas seulement sur le niveau technique de la mort fréquente et des boss durs à battre: il y a une similitude entre les thèmes abordées. Ce sera sûrement l’objet d’un prochain article.
1: Le metroidvania est un genre de jeu-vidéo qui trouve ses sources dans les jeux Metroid et Castlevania. Perdus dans des grands labyrinthes, le joueur doit visiter les moindres recoins pour y trouver un moyen de progresser. Ce backtracking (les nombreux retours dans les endroits déjà visités) peut frustrer de nombreux joueurs non initiés au genre. Les metroidvania se distinguent généralement par leur ambiance riche et diversifiée ainsi que par leur monde de grande taille.
2 : Les vaisseaux n’ont pas de genre propre -et donc le Chevalier non plus- mais pour des raisons de simplicité, je vais utiliser le masculin de « Vaisseau ».
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