Il s’agit là d’un vaste domaine avec différents niveaux d’interprétation. En effet, on peut passer d’un clin d’œil à un livre à l’écriture narrative elle-même. On peut également parler de jeux basés sur des livres ou, à l’inverse, des jeux qui ont donné naissance à des livres. Bref, c’est un trèèèès riche domaine et il serait inconcevable de tout traiter dans un article, ni même dans deux ou trois – quoique l’exercice pourrait être vraiment intéressant. Dans cet article, je me focaliserai sur le rapport qu’ont les jeux vidéos avec la Bible dans l’optique de montrer comment les jeux s’en emparent pour s’en inspirer. Et non, je ne parlerai pas du simulateur de Jésus !
La Bible, le livre le plus lu et sûrement le plus repris
La Bible est le livre le plus lu dans la monde. Comment un instant imaginer que le jeu vidéo puisse passer à côté d’un tel livre ? On trouve la trace de la Bible dans tant de jeux qu’on ne pourrait pas en faire la liste. Alors autant s’intéresser aux jeux qui le font et ne s’en cachent pas. Tout d’abord, la série des Soulsborne où les lieux religieux sont multipliés, les symboles de croix omniprésents…De plus, dans Bloodborne, le thème de l’accouchement d’une créature mi-divine, mi-humaine constitue une majeure partie de la trame narrative. Or la nativité occupe une partie importante du monde artistique car c’est sûrement l’une des scènes les plus représentées dans la vie de Jésus (mis à part sa crucifixion).

A la manière de l’Ancien Testament, les jeux du studio Fromsoftware mettent en avant l’arrivée d’un élu au travers d’une prophétie. Élu que l’on incarne et qui doit donner naissance à une nouvelle ère en éradiquant le mal qui ronge le monde. Ce ne sont pas de simples coïncidences: les Soulsborne s’inspirent de la Bible. Même certains détails n’échappent pas aux liens: on trouve des « miracles » parmi les différents sort mais aussi des transformations d’Hommes en arbre sur le haut mur de Lothric ou en loup-garou dans les marécages de Farron. Des buissons en feu sembleraient même plausibles !
Le Livres des livres trouve des échos dans de nombreux autres jeux comme dans la trilogie Bioshock. Il est inutile d’attendre le troisième opus pour entendre des ennemis qui disent « Jesus loves me« . Pourtant, c’est bien dans ce troisième jeu que la Bible trouve sa plus grande place. En réutilisant le vocable propre à la Bible, le jeu se paie le luxe d’en détourner les codes. Ainsi trouve-t-on des affiches qui nous mettent en garde contre le « Faux berger », « le chiffre de la Bête » … Encore une fois, il est question d’élu et de son penchant inversé: le diable qui viendrait ébranler l’ordre établi. La statue centrale de la ville volante est est un ange et son un chef un ultra religieux qui a tenté de recréer un Éden parfait.

Pour le meilleur et surtout pour le pire
Dans les jeux qui utilisent la Bible, on peut parler de The Binding of Isaac (littéralement: La Ligature d’Isaac) qui pioche allégrement dans l’Ancien Testament et rejoue la scène de la tentative de sacrifice d’Isaac par son père (sa mère dans le jeu). Le jeu pourrait facilement être une parodie si le côté gore n’était pas aussi présent. Le game designer avoue s’être inspiré fortement de sa propre enfance au sein du contexte religieux zélote. C’est une vision profondément pessimiste et morbide que le jeu nous livre à travers une atmosphère où la mort est omniprésente. Ce rogue-like voit s’incarner la Bible elle-même en tant qu’item à ramasser, mais c’est surtout les personnages qui évoquent le plus les Saintes Écritures ainsi que le Livre des révélations qui n’est autre que l’Apocalypse. À propos d’Apocalypse, 4 boss sont les cavaliers de l’Apocalypse (pestilence, guerre, famine, et mort)

En plus d’Isaac, on retrouve des personnage tels que Cain, Eve, Magdalene, Judas ou encore Samson; autant de personnages qui sont issus de la Bible. En plus d’affronter les délires mystiques de sa mère, Isaac doit faire face à ses propres démons. Loin de la rédemption, le jeu invite à plonger au plus profond des entrailles des limbes, les DLC ( The Wrath of the Lambs et Afterbirth) invitant à s’y immerger toujours un peu plus.
En cela, on peut le comparer à Blasphemous qui y va fort dans l’autoflagellation et l’appétit de la douleur. Étant donné que j’ai déjà rédigé un article sur Blasphemous (ici), je serai assez rapide en évoquant ce jeu de plateforme. Le milieu catalan fantasmé par la folie de dévotion de la Reconquista se prête particulièrement bien à une dévotion sans borne qui oscille entre sacrifice de soi et vénération de la douleur.
Vade retro satanas!
Enfin, dernier jeu (parmi une flopée d’autres) : The Textocist qui nous place dans la peau d’un prêtre dont la tâche est libérer le monde du mal: des affreux métalleux, d’horrible satanistes et des gens possédés. Dans ce bullet hell, non seulement vous devrez éviter les boules ennemies, mais en plus vous allez devoir taper des versets de la Bible qui apparaissent en bas de l’écran. Ce concept original et amusant est renforcé par l’humour présent: on peut équiper notre prêtre d’une multitude d’objets comme un col blanc renforcé. Nos points de vie figurent sur le chapelet du prêtre. Le jeu est toujours en complet décalage, entre le côté saint tourné au dérisoire, la difficulté du jeu et ce petit prêtre qui récite les phrases de son bréviaire.

Mis à part ces jeux cités, on retrouve plein de traces de la Bible dans les jeux vidéo comme le Templier décrit comme « zélote » dans The Darkest Dungeons à qui on peut confier un objet issu de la tradition religieuse chrétienne comme une croix ou les ordres divin. On aurait aussi pu parler de Draw your life, jeu qui nous met dans la peau de Dieu envoyant son avatar que le joueur dessine sur Terre pour sauver son peuple des forces du mal et restaurer ainsi l’équilibre, dans la pure lignée de Jésus (sauf que Jésus n’avait pas de flingues…)